Dans les rues de Kisantu, les femmes vivant avec un handicap se battent chaque jour pour exister. Mais dans les centres de santé de la région, elles doivent encore lutter pour quelque chose de plus fondamental : l’accès à leurs droits en matière de santé sexuelle et reproductive.

Stigmatisées, mal jugées, souvent ignorées, ces femmes vivent une réalité marquée par la marginalisation. Une femme handicapée, membre de l’association AÏSEFHA (Association pour l’Intégration et la Sécurisation des Femmes Handicapées), témoigne d’un moment douloureux : une fausse couche. « Je n’ai reçu ni accompagnement, ni écoute. Pour beaucoup, je n’aurais même pas dû être enceinte », confie-t-elle.
La sexualité des femmes en situation de handicap reste un sujet tabou. Dans les mentalités dominantes, ces femmes ne devraient pas avoir de vie intime, encore moins accéder à la maternité. Ces préjugés ont des conséquences graves. L’accès aux contraceptifs, aux consultations gynécologiques, aux soins liés à la grossesse ou à l’avortement reste extrêmement limité, souvent humiliant.
« Le jour où je suis allée acheter un contraceptif à la pharmacie, on m’a regardée comme une inconsciente. On m’a dit : ‘Tu ne te soucies donc pas de ton corps ?’ », raconte une autre femme. Ces jugements brutaux renforcent l’exclusion et empêchent de nombreuses femmes de prendre en main leur santé sexuelle.
Mais l’environnement médical n’offre pas non plus de solutions. À Kisantu, les centres de santé ne sont pas accessibles : pas de rampes, pas d’équipements adaptés, pas de confidentialité. Pire encore, le personnel médical n’est pas formé à prendre en charge les femmes vivant avec un handicap. Il en résulte un traitement souvent froid, maladroit, voire irrespectueux.

Mme Ndona Marleine, enseignante au lycée technique Sainte Marie de Kintanu et membre active de l’AÏSEFHA, tire la sonnette d’alarme : « Tant que les femmes handicapées seront invisibilisées dans les politiques de santé, elles continueront de souffrir en silence. Nous réclamons l’égalité d’accès aux soins, la dignité, et le droit de disposer librement de notre corps. »
Le combat pour la santé sexuelle et reproductive des femmes handicapées n’est pas un luxe : c’est une urgence. Il s’agit d’un droit fondamental. À Kisantu, et ailleurs.
Marley Mamona